Vous n’échapperez pas à la surveillance de masse, mais vous pouvez la gêner. C’est la théorie des chercheurs américains Helen Nissembaum et Finn Brunton. Dans leur livre Obfuscation, La vie privée, mode d’emploi ils expliquent comment embrouiller les algorithmes en publiant de fausses infos.
Dans le livre Obfuscation, La vie privée, mode d’emploi, les auteurs Helen Nissembaum et Finn Brunton partent d’un constat assez sombre. La surveillance est partout et il est d’ores et déjà très complexe d’y échapper. Pour le démontrer, ils publient une liste vertigineuse de toutes les fois où un individu est surveillé au cours d’une seule journée. De la caméra de surveillance dans sa rue aux phrases surlignées sur sa liseuse Kindle, en passant par l’utilisation de ses cartes de fidélité et de son smartphone… l’énumération ne surprend pas, mais la juxtaposition fait froid dans le dos.
Les auteurs définissent d’ailleurs l’obfuscation comme l’« arme du faible » . « On est de toute évidence dans un rapport très inégalitaire. Face à la volonté des États et des GAFA de contrôler nos données, il y a peu de solutions, explicite Laurent Chemla. C’est une guérilla », précise-t-il. Une guerre asymétrique. Et les armes de cette guerre sont économiques. En clair : on se bat contre des géants avec des bâtons, mais il faut se battre quand même. « Si tout le monde publie de fausses informations alors les données perdent de la valeur. C’est un moyen de financer un peu moins les monstres comme Google, Facebook et Amazon. »
Quel est l’ampleur de ce mouvement de protestation contre la collecte des données ? Laurent Chemla estime qu’il s’est densifié ces dernières années, mais il reconnait qu’il reste marginal. Notamment en France. « Sur les sujets de protection des libertés en ligne, la France est généralement un peu en retard. »
Pour eux, lutter contre la marchandisation des données et l’espionnage de masse est bel et bien une nécessité.
Pour Laurent Chemla, le réel antidote contre la surveillance de masse se trouve chez les services alternatifs à ceux des géants de la tech. Les utiliser permet de décentraliser le web et de complexifier le traçage des données. Toutefois, l’obfuscation reste, à ses yeux, une solution pertinente en attendant que ces services se démocratisent.