À quoi servent les monnaies locales?

Aujourd’hui, il est possible d’acheter une prestation chez le vétérinaire avec des «Épis» à Échallens ou de payer son café en «Lémans» à Lausanne. Les monnaies locales se multiplient en Suisse romande. Cette année, la région du Pays-d’Enhaut-Gruyère-Saanenland aura sa propre monnaie, la «Grue». La ville de La Chaux-de-Fonds également. Mais quelle peut être leur utilité à une échelle locale comme un canton? L’avis de deux spécialistes.

Officiellement, ce ne sont pas des monnaies, mais ce qu’on pourrait apparenter à des bons d’achat, puisque seule la Banque nationale suisse a le droit de frapper monnaie, selon la Constitution (art. 99). Néanmoins, en pratique, cela fonctionne comme une véritable monnaie, dont la valeur est équivalente à celle du franc suisse à l’achat, avec laquelle on paie des biens et des services. Sa spécificité est de circuler sur une aire géographique relativement restreinte, qui ne correspond pas nécessairement à un territoire administratif ou politique.

Alors que le franc suisse peut sortir du territoire vaudois par exemple, la circulation d’une monnaie locale est limitée géographiquement. Cela permettrait de se focaliser sur des objectifs locaux de solidarité, de développement économique, de lutte contre le chômage ou d’insertion des personnes vulnérables.

S’il ne s’agissait pas de monnaie locale au sens moderne du terme, le canton de Vaud a frappé monnaie, de manière très officielle, au 19e siècle. Suite à l’acte de Médiation imposé par Napoléon en 1803, les cantons suisses récupèrent leur souveraineté et leur autonomie monétaire, auparavant détenues par la République helvétique. Dès 1804, le canton de Vaud nouvellement créé fait usage de son droit de frappe. «Le canton va frapper des monnaies de 40, 20, 10, 5, 1 et 1/2 Batzen et de 2 1/2 et 1 Rappen, explique Nicolas Consiglio, alors conservateur au Musée monétaire cantonal. Tandis que l’atelier de fonte des pièces est installé à l’emplacement de bâtiment du Parlement, l’atelier de frappe est situé dans une salle du château cantonal.» Aujourd’hui, les socles des balanciers sont visibles dans le sol de la «salle des monnaies», l’actuelle cafétéria, protégés par une vitre. En 1825, Vaud s’allie aux cantons d’Argovie, Bâle, Berne, Fribourg et Soleure pour unifier et stabiliser le système monétaire et ainsi faciliter les échanges. En 1850, les monnaies cantonales sont remplacées par le franc suisse. La production est dès lors centralisée à Berne.

En matière fiscale, les contribuables doivent faire figurer dans leur déclaration d’impôt les montants de la monnaie locale en leur possession, au même titre que les crypto-monnaies.